Derrière Findus, les PAT
Ça fait du bien de rire. En ce moment, pour ça, (naturellement) il y a Findus ! Entre le faux pa-cka-ging de lasagnes sur lequel s’invite le Petit Poney, la parodie de publicité pour Krys montrant un cheval chaussé de lunettes devant le slogan « Avant j’étais un bœuf » et la fausse campagne de pub prêtant à Findus l’affirmation que le groupe est « très à cheval sur la provenance de ses ingrédients », l’affaire du canasson roumain recyclé n’a pas fini de susciter les moqueries.
On rit parce qu’il est difficile d’en pleurer : le problème est tellement étendu que plus personne ne songe à s’étonner. Moi aussi je ris quand je lis encore dans une boucherie que « tout est bon dans le cochon »… sachant comment sont fabriquées nos charcuteries « traditionnelles ». Mais ne rit-on pas aussi un peu pour oublier tout ce qui se trame de plus grave à la Commission européenne ? Couverte par toute cette agitation autour de la viande mal étiquetée, celle-ci vient ainsi de ré-autoriser les farines animales dans l’alimentation des poissons.
Bannies à la faveur de la crise de la vache folle, ces farines (ou protéines animales transformées, PAT), moins chères que les farines de poisson, doivent permettre de relancer le secteur de la pisciculture. Un argument qui, même si notre pays dit non à ce retour en arrière, aura du mal à ne pas séduire certains éleveurs qui voudront être concurrentiels face à leurs voisins européens. Le poisson étant largement importé, il va être difficile également pour le consommateur de s’y retrouver. Enfin et surtout, vu la transparence de la filière animale, ce n’était pas du tout le moment de réintroduire un maillon de plus dans la chaîne.
La Commission, pour le coup, est-elle sérieuse quand elle ose nous assurer que « la traçabilité [des PAT] sera exigée tout au long de la chaîne d’alimentation » ? À moins de vouloir nous faire rire, comment établir une traçabilité sur des sous-produits retraités quand on n’est même plus capable de reconnaître de la viande ?
L’opacité des étiquetages et, d’une façon générale, de notre alimentation transformée (congelée, réchauffée, hachée, recyclée, stérilisée, recuite…) n’est pas si grave concernant une simple confusion entre deux animaux (ou entre deux poissons puisqu’aux États-Unis, une étude vient de révéler que 59 % du thon consommé n’est pas du thon…) En revanche, elle l’est bien plus au regard de tout ce qu’elle permet aux industriels de faire passer dans nos assiettes. Du thon au porc, cela fait bien longtemps qu’on ne sait plus qui manque quoi, et qu’on ne sait plus qui accuser de fraude !
Dans ce contexte, rappelons que le bio, en même temps qu’il apparaît comme une alternative possible (cette année, tous les grands quotidiens lui ont consacré leur une pour saluer l’ouverture du Salon de l’agriculture) est lui aussi menacé. Parce que le lobbying bat son plein à Bruxelles.
Ne soyons pas dupes du récent sondage mis en place par le commissaire à l’Agriculture. Au vu de la formulation des questions, il pourrait bien servir de base à de nouveaux compromis sur la certification bio… « Vérifier l’absence de résidus de pesticides dans tous les produits bio augmenterait les coûts de production, et donc le prix de ces aliments. Faudrait-il quand même rendre cette mesure obligatoire ? »
Il faut bien sûr répondre à ces questions, mais, comme le rappelle une lectrice de Bio Info sur notre page Facebook, n’oublions pas « que les producteurs se sont mobilisés en masse […] contre la loi qui voulait faire passer la part d’OGM dans le bio à 0,9 % du contenu et que malgré cela, [cette loi] est passée ».
Face aux autorités qui ne manquent pas de sens comique, essayons, nous, de garder notre sérieux.