Des trophées pour limiter la souffrance animale
La notion de « bien-être animal » sous-tend la reconnaissance de la nature sensible des animaux, c’est-à-dire de leur capacité à ressentir du plaisir, de la souffrance, des émotions. En France, le Code rural précise que « tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ». Et, un peu plus loin, qu’il est « interdit d’exercer des mauvais traitements envers les animaux domestiques ainsi qu’envers les animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité ». Certains propriétaires d’élevages seraient donc hors la loi ? « Le statut juridique des animaux n’est pas clair, affirme Brigitte Gothière, porte-parole de l’association L214, car le Code rural reconnaît le caractère sensible des animaux, mais le Code civil, qui a peu évolué depuis 1804, les classe dans la catégorie des biens, meubles ou immeubles ».
Nombre d’associations de défense des animaux demandent ainsi une harmonisation des lois qui permettrait de définir un statut juridique précis des bêtes. Si certaines, comme One Voice ou L214, vont jusqu’à dénoncer le seul fait d’élever et de tuer des animaux pour les manger, prônant le végétarisme, d’autres, plus modérées, comme l’ONG CIWF, mettent en avant les notions de respect de la nature et proposent des solutions à ceux qui souhaitent manger carné, mais éthique.
CIWF : repenser la filière agroalimentaire
Pour les premières, la sensibilité animale doit être comprise comme égale à celle de l’homme (récemment, une « opération barquette » organisée par L214 mettait en scène des activistes enduits de faux sang, invitant les passants à imaginer être eux aussi tués pour être mangés). Pour les autres, l’industrie agroalimentaire doit être repensée.
Selon CIWF, du respect des animaux découle celui de l’environnement et de la santé humaine et, bien sûr, la sécurité alimentaire. Or les conditions de promiscuité des élevages favorisent une hygiène déplorable et le développement de maladies et d’infections, jugulées à grands coups d’antibiotiques qui se retrouvent aussi dans nos assiettes. Qui dit élevage intensif dit aussi agriculture intensive, car il faut bien nourrir les animaux : 70 % de la consommation d’eau en France serait attribuée indirectement à l’élevage, sans compter l’usage tout aussi intensif de pesticides et la pollution des terres…
Œufs d’or
Pour alerter le consommateur, CIWF France organise régulièrement des campagnes de sensibilisation à la cause animale dans les élevages français. Depuis 2009, les grandes entreprises, distributeurs et collectivités qui utilisent, ou s’engagent à utiliser dans les 5 ans des produits issus d’élevages respectueux des animaux (poule, vache, porc) se voient remettre des trophées. Les Œufs d’or, par exemple, récompensent ceux qui s’approvisionnent ou s’engagent à s’approvisionner en œufs et ovo-produits issus d’élevage hors cage – au sol, plein air ou bio. En 2012, le groupe Ikea a obtenu les trophées des Poulets d’or pour s’être engagé à servir dans ses cafétérias, des poulets élevés hors cage. En 2013, la remise des trophées du Bien-être animal aura lieu le 30 octobre à Paris.
Si supprimer la souffrance animale de nos assiettes n’implique pas forcément de devenir végétarien, manger de la viande en ayant conscience de son origine, de la façon dont ont été traités, transportés et tués les animaux est un minimum. En attendant une loi obligeant à l’étiquetage, le consommateur est invité à privilégier la consommation d’œufs bio ou issus de poules élevées en plein air, et de viandes de porc, de bœuf ou de volailles bio, Label Rouge ou AOC, qui garantissent le respect des impératifs biologiques de l’animal. La question se pose malgré tout : tant que l’élevage intensif sera autorisé, ne sera-t-il pas difficile de parler d’un réel bien-être animal ?
Porcs
La loi n'est pas respectée
Selon la loi européenne, les éleveurs porcins doivent mettre à la disposition de leurs porcs des matériaux manipulables leur permettant de fouir comme ils le feraient dans la nature, ils doivent proposer des bâtiments de vie propres et confortables et ne pas pratiquer la coupe systématique des queues. Un minimum qui est loin d’être respecté. Le 10 septembre 2013, un cochon de 6 mètres de haut enfermé dans une cage à peine plus grande que lui a été érigé par l’ONG CIWF sur le parvis de la gare Montparnasse, à Paris. Le but : sensibiliser aux conditions d’élevage porcin et recueillir des signatures pour la pétition « Une vie meilleure ». Cette pétition sera adressée au ministre de l’Agriculture et aux membres du Conseil de l’UE agriculture afin de demander, dans un premier temps, que les lois existantes soient appliquées.