La tétine, pour ou contre ?
Croiser un enfant tétine à la bouche est devenu banal. Vous n’avez pas la berlue : 80 % des enfants en sont dotés ! Un chiffre corroboré par l’étude menée en 2011 dans les maternelles de Cagnes-sur-Mer par la faculté de chirurgie dentaire de Sophia Antipolis, qui observait aussi qu’à l’âge de 4 ans, 46,5 % des enfants en étaient encore munis. Dix millions de tétines sont vendues chaque année sur le marché français.
Apaisement express
Sans conteste, et c’est ce qui explique son succès, la tétine procure un effet d’apaisement immédiat au nourrisson, car elle satisfait son réflexe de succion non nutritive, acquis in utero. Les services de néonatalogie l’utilisent même pour ses vertus antalgiques lorsqu’ils doivent procéder à des soins douloureux. Autre argument en sa faveur : l’usage de la tétine préviendrait le risque de mort subite du nourrisson. « On n’en connaît pas le mécanisme exact, mais les études concordent », commente le pédiatre Rémy Assathiany, qui a présenté une synthèse des publications scientifiques sur la tétine au Congrès de la Société française de pédiatrie en mai 2013.
Est-ce suffisant pour succomber à l’appel de la tétine ? « Le bercement, le peau-à-peau, le portage, la voix de la maman doivent être privilégiés pour calmer un enfant. La tétine est un moyen parmi d’autres, ce n’est pas celui que je préconiserais en premier. D’autant que si elle fait cesser les pleurs, elle n’en résout pas la cause », souligne le pédiatre. Proposée dès la naissance, la tétine risque en outre de compromettre l’allaitement, car le mode de succion diffère. « L’académie américaine de pédiatrie recommande d’attendre que le bébé soit âgé d’un mois. »
Les futurs parents doivent donc être prévenus : la tétine n’aide pas le bébé à faire ses nuits, au contraire. S’il apprend à s’endormir avec, il ne saura pas retrouver le sommeil sans, lorsqu’elle sera tombée de sa bouche.
Palais déformés
Véritable nid à microbes, la tétine est également suspectée de favoriser les otites. Plus grave : à long terme, elle est responsable de déformations bucco-dentaires. En 2011, les orthodontistes en ont fait le sujet de leur congrès : palais ogival, dents en avant, difficulté à prononcer les sifflantes, tendance à postillonner… À leurs yeux, rien ne sauve la tétine, pas même la comparaison avec le pouce ! « Plus l’usage de la tétine est fréquent et prolongé, plus les déformations sont importantes. Il est recommandé de l’abandonner avant que l’enfant ait 1 an », abonde le Dr Assathiany.
Le mieux est donc de s’en passer. « La tétine peut être utile aux mamans qui ont des difficultés, nuance le médecin. Dans le cas d’une maman déprimée, hésitante et peu soutenue, elle contribue à rétablir le calme et facilite donc l’instauration de la relation mère-enfant. » Son recours doit se limiter aux moments où le bébé en a réellement besoin. Quant à savoir dans quel matériau la choisir, il est préférable d’opter pour le caoutchouc, plus naturel que la silicone, et de veiller à ce qu’il soit sans adjuvant chimique, à l’image de ce que proposent les marques Hévéa et Goldi.
Au Danemark
Un arbre à tétines pour lui dire adieu
Les parents des petits Danois ont inventé un rituel (pas très bio), dont le nom original, Pacifier Tree, traduit bien le rôle : inciter les enfants à se débarrasser de leur tétine en l’accrochant à un arbre, éventuellement accompagnée d’un mot d’adieu. Les petits Français l’offrent plus volontiers aux cloches de Pâques ou au Père Noël en échange d’un cadeau. Une astuce qui facilite l’abandon de cette habitude quand l’enfant y est encore accro après ses deux ans.
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