Éco-gastronomie : le cresson de fontaine, une salade menacée par l’agriculture intensive
Il n’est cependant cultivé que par une vingtaine de producteurs. L’association Slow Food en a fait l’un de ses chevaux de bataille. Histoire d’une restauration.
Le cresson de fontaine est la première Arche du Goût francilienne pour le mouvement Slow Food. Par ce statut, l’association entend attirer l’attention du public sur des denrées de qualité en voie de disparition. Il s’agit en l’occurrence de l’espèce Nasturtium officinale (ou cresson officinal), à ne pas confondre avec le cresson de terre (Barbarea verna) ou avec le cresson alénois (Lepidium sativum), ces deux dernières espèces poussant dans les lieux secs.
Les vertus diététiques du cresson de fontaine
sont exceptionnelles : porté par une saveur piquante pour le palais qui se marie très bien à d’autres salades, ce végétal est riche en vitamines C, A, B6 et K ainsi qu’en minéraux comme le fer, le calcium et le manganèse.
Une production en danger
Avec sa quinzaine d’hectares de culture défendus par une vingtaine de cressiculteurs de la commune de Méréville en Essonne, le cresson de fontaine ne pèse pas lourd dans
l’agriculture francilienne. En effet, le bassin parisien possédant des sols très fertiles, la moitié des exploitations agricoles franciliennes font plus de cent hectares. On peut ainsi parler d’une agriculture intensive et spécialisée dans cette région. Celle-ci est très largement dominée par des oléoprotéagineux (colza et tournesol) et des céréales (blé et orge) ainsi que par d’autres cultures d’exportation (betterave notamment), sous perfusion de la Politique agricole commune (PAC)
.
Loin des pratiques mécanisées, la culture du cresson de fontaine est le fruit d’un aménagement artisanal et complexe du milieu naturel en diguettes, situées en aval d’une source d’eau, et d’un travail manuel traditionnel dont les gestes remontent au XIXe siècle. Il existe aussi des cultures de cresson de fontaine dans la région Nord-Pas-de-Calais : sa production est en effet multisituée et implique de fortes contraintes écologiques.
De nombreux changements menacent aujourd’hui sa culture. Le cresson de fontaine a connu une chute de consommation de 50 % entre les années 1960 et
1970, et le nombre d’exploitations a été divisé par deux en quarante ans. La petite plante potagère fait notamment face à la concurrence féroce des salades et roquettes sous vide et sans saveur que l’on trouve partout.
De l’Arche du goût à Sentinelle
Aujourd’hui, plusieurs familles de cressiculteurs sont certifiées bio, bien que la certification de l’eau ne soit toujours pas dans les compétences des organismes concernés. Enfin, une véritable question de commerce équitable se pose : les cressiculteurs vendent à un prix qui varie chaque année en fonction de l’offre et de la demande. Cela ne leur permet pas de couvrir leurs frais de fonctionnement. Pas très attractif pour les jeunes qui veulent se lancer… Slow Food souhaite donc transformer cette Arche du Goût en Sentinelle, un statut qui lui permettrait de soutenir directement les cressiculteurs et acheteurs voulant s’impliquer pour le cresson de fontaine.
Où en trouver?
Chez Terroirs d’Avenir, 7 rue du Nil, 75002 Paris, tél.01 81 70 97 98.
Les pépiniéristes en proposent également en semences.
Slow Food est une association internationale créée en 1986 en Italie, qui défend une nourriture « bonne, propre et juste » pour tous, notamment en revalorisant les produits traditionnels du monde menacés de disparition. Infos : www.slowfood.fr.
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