Charles Kloboukoff, patron citoyen
Parcours
Un entrepreneur distingué
Charles Kloboukoff est issu d’une famille aristocrate russe ayant émigré en France avant la révolution de 1917. Diplômé de l’École supérieure de gestion de Paris, il entame sa carrière chez Intermarché. Il crée sa société à Paris en 1993, puis l’installe en 1996 à La Rochelle. Aujourd’hui, Léa Nature est connue notamment grâce aux marques So’Bio Étic, Floressance, Lift’Argan, Natessance, Eau thermale Jonzac ou encore Jardin bio. Membre de plusieurs fondations, dont « Fier de mon quartier » à La Rochelle, Charles Kloboukoff a obtenu plusieurs récompenses dont la Marianne d’or 2007 pour sa campagne en faveur des abeilles et le prix de l’Entrepreneur 2009 par Ernst&Young dans la catégorie Business vert. En tant que conseiller municipal de La Rochelle, il a été l'un des premiers à croire à la ville sans sacs plastique. En marge de la COP 21, la Fondation Léa Nature Jardin Bio s'est d'ailleurs engagée avec le club 1% For the planet et la Surfrider foundation dans la campagne Océan mon amour.
Bio Info Votre famille prônait déjà les médecines naturelles… Vous êtes né avec le bio?
Charles Kloboukoff Oui, cela m’a beaucoup marqué. Dans ma famille, russe, quand on avait un rhume, on renforçait notre système immunitaire avec du pollen. Mon grand-père était sourcier et travaillait sur l’usage de l’homéopathie. Nous sommes ce que nous mangeons, respirons, consommons, côtoyons. C’est cette idée qui me guide. Mon objectif en quittant la vie parisienne pour La Rochelle était de faire vivre mes enfants dans un milieu plus sain. Il fallait trouver dans la nature tout ce dont on avait besoin pour être en bonne santé. La nature est l’une des rares choses que l’homme n’a pas créées.
B. I. Comment définiriez-vous la signature de Léa Nature ?
C. K. Historiquement, c’était les bienfaits de la nature, avec un prénom féminin. C’est une forme d’harmonie, un trait d’union entre ce que la nature apporte à l’homme et ce que celui-ci doit lui rendre. La nature a besoin qu’on prenne soin d’elle.
B. I. Qu’est-ce qu’un produit pertinent ?
C. K. Dans l’idéal, c’est un produit qui va répondre à un besoin en apportant du plaisir et du sens. Et surtout, qui est un instrument du lien entre les êtres ! La possession des choses est souvent un objet de discorde entre les êtres humains. J’aime les objets qui rassemblent.
B. I. Dans votre livre*, vous parlez de quête, l’avez-vous atteinte et quelle est celle de 2014 ?
C. K. 2013 a été l’année des 20 ans de Léa Nature. C’est l’âge de raison. L’entreprise devient adulte, elle a besoin de s’émanciper de son créateur. Je vais devoir apprendre à mieux déléguer - je suis encore un peu paternaliste… Il faut que j’apprenne à gérer ce détachement pour ne pas être trop intrusif. La vocation de Léa Nature est en train de s’affirmer. Nous marquons mieux nos différences et nos choix en termes de qualité, de filières, et de refus des compromis qu’on aurait pu être tentés de faire, notamment avec la grande distribution.
B. I. Un rapprochement avec les magasins bio ?
C. K. Nous avons une affinité de plus en plus forte avec les consommateurs des magasins bio, dont la démarche est plus en phase avec la nôtre. Nous vivons avec les deux types de distribution, mais nous nous développons de plus en plus avec les réseaux qui montrent leur niveau d’exigence. Nous faisons de plus en plus de spécifique par circuit. C’est le cas, en cosmétique, avec Secrets de Léa, conçue spécialement pour les magasins bio. Notre part dans le réseau bio atteint 40 % et sera probablement majoritaire dans les années à venir.
B. I. Où en êtes-vous dans la recherche d’un autre modèle d’entreprise ?
C. K. Je souhaite augmenter notre contribution sociétale et environnementale. C’est très important pour moi. La société est, selon la définition, une personne morale. Pourtant, dans les statuts, on lit « société à responsabilité limitée » puis « société anonyme »! C’est incroyable, où est la moralité ? Une entreprise est là pour participer à la vie locale, à la mixité sociale - accueillir des groupes, faire du mécénat, redistribuer des richesses en local, organiser des rencontres… L’entrepreneur doit l’emmener vers cette fonction sociale, un peu oubliée.
* « Itinéraire d’un entrepreneur engagé », Charles Kloboukoff, préface de Pierre Rabhi, éd. Leduc.S, octobre 2013.
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