Le sarrasin se porte bien
L'Atelier Sarrasin a été inauguré en janvier 2015 à Montbard (Côte-d'Or). Benoît Wartel et Nicolas Crabot y produisent aujourd'hui 25 tonnes de biscuits au sarrasin, bio et certifiés sans gluten, qu'on trouve en magasins bio (Biocoop, L'Eau vive, Les Nouveaux Robinson...). Sucrés ou salés, ils affichent de jolies formes et des textures variées, une saveur douce et un croquant réussi, le tout sans ingrédients superflus. De quoi séduire les papilles exigeantes d'Alain Ducasse, qui a eu l'occasion de les goûter... et les nôtres ! Le chef travaille d'ailleurs lui-même cette céréale afin de lui redonner ses lettres de noblesse. Au menu de son restaurant du Plaza Athénée, on trouve le sarrasin en glace, torréfié... Et les biscuits de L'Atelier Sarrasin commencent à intéresser les épiceries fines.
Une plante pollinisatrice et peu gourmande en engrais
Leurs packagings refaits en janvier 2016 par un designer signent une nouvelle gamme : huit recettes alléchantes dans lesquelles la farine de sarrasin, moulue à l'atelier sur meule de pierre, se marie à la tomate, à la tomme ou au fenouil, mais aussi au citron, à la figue ou encore à la cannelle, l'épice de la joie affectionnée par Hildegarde de Bingen. Un polygone évidé en guise de logo symbolise la fleur, qui est au centre de ce projet.
Car derrière la gourmandise se joue le renouveau de cette céréale oubliée, pourtant dotée de qualités nutritives et écologiques exceptionnelles. Sa jolie forme de polygone le dit... « Pour nous, le sarrasin est une plante magique. Elle fleurit, attire les pollinisateurs et pousse sur des sols pauvres, sans nécessiter ni engrais ni produits phytosanitaires », souligne Benoît Wartel. « Les multinationales comme Monsanto s'en sont désintéressées pour cette raison », renchérit Nicolas Crabot, impatient de contribuer au renouveau de sa culture en France. D'après les deux fondateurs, la demande est forte de la part des agriculteurs.
La céréale du pauvre au menu des gastronomes
Longtemps connotée blé du pauvre, la culture de cette céréale rustique a persisté en Bretagne, enfermant sa réputation dans les célèbres galettes de blé noir. « Mais sans vouloir vexer les Bretons, nous pensons que le sarrasin mérite encore plus que la Bretagne ». Et que la Chine, aujourd’hui premier producteur mondial de sarrasin et un bon consommateur. À raison car la plante est presque un super-aliment, apportant, pour 100 g, près de 230 mg de magnésium, plus de fibres solubles que le blé, des protéines réductrices du cholestérol (lysine, arginine...) et de nombreux autres minéraux.
Bientôt produit en France
Robert de Villeneuve, dans la région palloise, et Jean-Pierre Donet, plus près de Montbard, à Avallon, ont proposé à L’Atelier Sarrasin de cultiver la Spacinska Zita, une variété décortiquable différente de la traditionnelle harpe, la variété produite notamment en Bretagne. Ces deux agriculteurs bio répondront ainsi au cahier des charges de la marque : recevoir une variété de sarrasin décortiquable afin de produire une farine à la saveur douce qui ait gardé ses qualités nutritives. Actuellement elle est importée de Lituanie, un premier pas vers la maîtrise totale de la chaîne de production souhaitée par les deux entrepreneurs « dans un futur proche ». « D'ici la fin de l'année nous voudrions que le sarrasin, aujourd'hui importé de Lituanie, soit produit en France ».
Un projet local
L'Atelier Sarrasin est né du rachat en décembre 2014 de la biscuiterie Antoine, qui a produit de 1998 à 2014 ses biscuits avec une farine biologique importée de Chine qu’il « fallait la faire certifier deux fois par acquis de conscience ». Benoît Wartel et Nicolas Crabot ont repris les deux salariés de l’entreprise, spécialisés dans la pâtisserie et l'emballage. « C'est une des raisons qui nous ont poussés à nous installer à Montbard » : les deux anciens salariés de la Biscuiterie d'Antoine habitent à 20 km. Deux employés sont venus s'ajouter à cette équipe d'origine ainsi que quelques investisseurs séduits par le projet.
De la grande distribution à la biscuiterie
La ville, située à une heure de TGV de la capitale, se trouve aussi dans une zone RR, où les nouvelles entreprises sont exemptées d'impôt pendant 5 ans. « Une sorte de paradis fiscal en France », plaisante Nicolas Crabot, qui y a vu surtout une opportunité de créer de l'emploi et une activité porteuse de sens. « Faire travailler en local plombier, serrurier, agence de publicité et imprimerie, ça n’a pas de prix », avoue Benoît Wartel, qui a travaillé dans la publicité. Issu du milieu de la grande distribution, le cofondateur de la marque a été aussi séduit par le sarrasin, une « plante d’avenir, un pollinisateur puissant aujourd’hui importé à 80% » que par l’activité de biscuiterie et son impact sur l’économie locale.
Une « aventure humaine » dans laquelle le bio apparaît comme un « engagement incontournable », mais qui promet donc d’aller beaucoup plus loin. D’après les agriculteurs qui viennent frapper à la porte de l’atelier, la demande est énorme. Il faudra peut-être songer à mettre au point une bière, des tisanes, pâtes, crackers....
Infos et boutique : www.ateliersarrasin.fr
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