Diane 35, un scandaleux retour
Mise sur le marché comme traitement contre l’acné, elle était prescrite comme pilule contraceptive. Après avoir été reliée à plus de cent accidents vasculaires, mortels pour certains, elle a été interdite en France début 2013. Un retrait de courte durée puisqu’elle est de nouveau disponible dans les officines depuis mi-janvier.
Emballage, nom, présentation, composition et stratégie marketing, Diane 35 a été dès son lancement la « pilule qui donne une belle peau ». Avec ses 2 mg de cyprotérone (un progestatif actif contre l’acné) et ses 35 μg d’éthinylestradiol (d’où son nom Diane 35), elle se présente comme un antiacnéique puissant, doté de propriétés contraceptives. Sauf qu’officiellement, Diane 35 n’a jamais été une pilule contraceptive mais seulement un médicament contre l’acné… Et c’est pour cette seule indication qu’elle a reçu son autorisation de mise sur le marché en France en 1987.
Six fois plus dangereuse
Dès les années 2000, des chercheurs britanniques ont montré que la cyprotérone exposait à un risque d’événements thromboemboliques (phlébites ou embolies pulmonaires) particulièrement élevé… « Diane 35 présente six fois plus de risques de provoquer un accident vasculaire que la pilule classique », précise le Pr Henri Joyeux. En France, « la Haute Autorité de santé a signalé le problème il y a dix ans, mais il aura fallu des morts pour que l’alerte soit enfin donnée… par les médias ! » souligne Claude Reiss, ancien chercheur au CNRS et fondateur d’Antidote Europe… Selon l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), en vingt-cinq ans, 125 cas de thromboses (caillots) veineuses, dont quatre mortels, lui sont directement imputables.
L’UE court-circuite, Bayer gagne
L’alerte des médias a au moins eu pour conséquence le retrait immédiat de Diane 35 (distribuée depuis 2008 par les laboratoires Bayer) et de ses 135 génériques, dès la fin janvier 2013, par l’ANSM. Mais comme pour des raisons réglementaires, aucun pays de l’Union européenne n’a le droit d’interdire un médicament sans en référer à l’autorité communautaire, le dossier fut confié à l’arbitrage de l’Agence européenne du médicament (EMA).
En mai 2013, le Comité de pharmacovigilance et d’évaluation des risques (PRAC) de cette institution concluait ainsi que le rapport bénéfice-risque de Diane 35 était favorable chez les patientes souffrant d’hirsutisme ou d’une acné résistant aux traitements. Autrement dit que, limitée à ces indications, cette pilule peut continuer à être prescrite ! Même si, en plus d’être à haut risque thromboembolique, son efficacité sur l’acné reste discutable, tout comme son pouvoir contraceptif (et pour cause, celui-ci n’a jamais été évalué !)…
Le 30 juillet 2013, la Commission européenne a imposé à la France de laisser Bayer remettre sa Diane 35 sur le marché, ce que le laboratoire a fait en janvier dernier. Si Diane 35 ne peut plus être prescrite que comme antiacnéique contraceptif (et non plus comme contraceptif antiacnéique…), tout comme ses homologues, osons dire qu’elle ne devrait plus l’être du tout !