Bioéthanol et biodiesel : de quoi parle-t-on ?
Pour lutter contre le changement climatique, la France s’est engagée à intégrer une part d’agrocarburants dans les transports. Un point sur le bioéthanol et le biodiesel.
Le bioéthanol de 1ère génération (1G) est un alcool fabriqué par distillation des sucres produits par les végétaux. En France, on utilise surtout la betterave sucrière ou le blé. Contrairement à ce que pourrait laisser penser le préfixe de « bioéthanol » ou de « biodiesel », ces cultures n’ont aucune obligation de respecter des règles de l’agriculture biologique. D’ailleurs, il n’existe pas de filière bio pour la betterave sucrière, qui compte parmi les plus consommatrices d’herbicides selon l’enquête de 2014 du ministère de l’agriculture sur les pratiques phytosanitaires.
On incorpore le bioéthanol tel quel ou sous forme d’ETBE (éther éthyl tertio butyl) dans :
- SP95 et SP 98 (jusqu’à 5 % d’éthanol ou 15 % d’ETBE en volume), SP95-E10 (10 % d’éthanol ou 22 % d’ETBE)
- superéthanol E85 (de 65 à 85 % d’éthanol) destiné aux véhicules à essence ou hybrides équipés d’un boîtier électronique « flexfuel ».
- ED95 (95 % d’éthanol) destiné à certains cars, bus et camions au moteur diesel adapté.
90 % des plantes utilisées en France pour fabriquer bioéthanol et ETBE proviennent du territoire. Une différence de taille avec le biodiesel, destiné aux carburants de type gazole et fabriqué à partir d’huiles, le plus souvent végétales comme le colza, l’huile de palme ou le soja. La moitié de la biomasse destinée au biodiesel était importée en 2015 : Malaisie et Indonésie (13,9% ), Allemagne (9,9%), Ukraine, Australie, etc. C’est l’agrocarburant le plus commercialisé en UE : il représente 80 % du marché.
Quels impacts ?
Selon l’étude Globiom réalisée en 2015 sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) des agrocarburants , le biodiesel serait en moyenne 80 % pire pour le climat que le diesel fossile. Ses émissions atteignent ainsi 231 grammes équivalent CO2 par mégajoule avec le palmier à huile, 150 gCO2éq/MJ avec le soja. A comparer aux 95 gCO2éq/MJ d’un carburant fossile.
Plus sobre serait le bioéthanol, avec 34 geqCO2/MJ s’il vient du blé, 17 gCO2éq/MJ pour les maïs, canne à sucre ou betterave.
Ces émissions s’expliquent par le fait que ces biocarburants 1G reposent sur l’utilisation de terres, initialement dédiées à la production alimentaire : c’est ce qu’on appelle le changement d’affectation des sols indirect (CASI). La demande en agrocarburants entraîne la mise en culture de nouvelles terres à des fins alimentaires souvent préalablement déforestées, entraînant de nouvelles émissions de CO2. Sans compter que la concurrence entre énergie et alimentation a des impacts sociaux de taille, relève le Réseau Action Climat. Par ailleurs, une étude récente montre que la biodiversité des vertébrés pourrait sévèrement pâtir du CASI si l’expansion des cultures d’agrocarburants devenait une des principales stratégies de lutte climatique.
Quel avenir ?
Depuis 2015, l’UE revoit à la baisse ses objectifs de biocarburants 1G dans les transports. D’après un communiqué du Conseil de l’Europe de juin 2018, il faudra substituer aux « biocarburants présentant un risque élevé d'induire des changements indirects dans l'affectation des sols » des biocarburants dits avancés, issus des fibres lignocellulosiques des résidus agricoles (paille) et forestiers (bois) ou de plantes cultivées dédiées (taillis). En France, la part maximum de biocarburants 1G, bioéthanol ou biodiesel, ne devra donc pas dépasser 7% d’ici 2028.
Quelques références :