Reprendre le chemin du goût

PUBLIÉ LE 21 août 2013

Le Slow Food gagne du terrain. Fromages, vins, viandes, sirops : autant de trésors gastronomiques que ce mouvement international a contribué à sauver de la disparition.
À découvrir cet été au gré de nos promenades.

 

 

 

Fondé par le critique gastronomique italien Carlo Petrini, le mouvement Slow Food s’oppose à la culture du fast-food en prônant, depuis 1986, le retour à la localité, au goût et à la saisonnalité des produits alimentaires. Bon, propre et juste est sa devise. Plaisir, culture, territoires et traditions sont les mots clés de son art de vivre.

Pourtant, en 27 ans, ce club international de gastronomes symbolisé par un pacifique escargot est devenu l’un des fers de lance les plus efficaces de la lutte pour la biodiversité, souvent aux côtés d’autres mouvements comme les Colibris ou le mouvement pour la réforme de la PAC. Slow Food, qui s’appuie sur un maillage de conviviums, antennes locales attentives chargées de goûter, échanger, se réunir, mais aussi d’organiser des événements et de proposer des dossiers, possède ses propres armes : l’Arche du goût, une liste de plus de 1 100 denrées menacées par la standardisation agroalimentaire, à sauver du déluge de la malbouffe, et les Sentinelles, produits auxquels le mouvement réserve une réelle protection défensive.

Plus versé dans l’action et la convivialité que dans l’institutionnel et les belles paroles, Slow Food dédie à chacun de ces produits Sentinelles le projet de sauvegarde ou de relance qui lui convient, avec le but clair de le voir retrouver le chemin de nos assiettes. Notre but est que le produit retrouve un marché, explique Armelle de Saint Sauveur, vice-présidente de Slow Food Bastille, à Paris.

En fonction des territoires et des régions du monde, les projets consistent à promouvoir les produits lorsqu’ils sont peu connus, à organiser entre eux et soutenir les producteurs, à faire renaître un savoir-faire local grâce à de la formation, à promouvoir des débouchés économiques, parfois à défendre une ethnie de certaines menaces, résume la responsable, dont l’équipe planche actuellement sur le cresson de l’Essonne, un produit artisanal dont la production demande un savoir-faire traditionnel très particulier.

L’Arche du goût

En 1996, Slow Food a créé l’Arche du Goût, un grand projet de sauvegarde et de mise en valeur de la production agroalimentaire menacée d’extinction, lieu de sauvegarde et de mise en valeur de la production agroalimentaire menacée d’extinction. Un lieu où l’on documente, par convivium et comités nationaux interposés, les savoir-faire, cultures, élevages, espèces et techniques de production menacés.

Avant d’en faire de vraies Sentinelles du goût. Développées d’abord en Italie où la méthode a fait ses preuves, les Sentinelles sont aujourd’hui plus de 400 dans le monde. En France, on en dénombre à ce jour quinze. C’est paradoxalement peu pour un pays comme la France, souligne Armelle de Saint Sauveur, qui explique ce fait par une habitude déjà bien ancrée de protéger les trésors de la gastronomie locale. Et une notion de terroirs acquise.

Bruxelles Champêtre

Slow Food partenaire et partie prenante

Comme l’an dernier, Slow Food participe à l’organisation de Bruxelles Champêtre, le 22 septembre. À l’invitation de Catherine Darfeuille, membre du bureau de Slow Food France, une vingtaine de petits producteurs français viendront ainsi renouveler leur expérience bruxelloise de 2012. Biscuits, fromages, miel, foie gras, gâteaux, vins et liqueurs… Devant le Palais Royal, la philosophie du bon, propre et juste chère à Slow Food sera véhiculée en tout par une centaine d’exposants belges et étrangers. C’est l’an dernier, pour fêter ses dix ans, que l’événement, initié en 2002 par Thierry Vandebroek a souhaité prendre cette dimension internationale. Le Marché des Producteurs Slow Food français est également une belle occasion pour le mouvement de renforcer ses liens transfrontaliers. Slow Food Belgique compte déjà 11 groupes locaux – cinq en Wallonie, cinq en Flandre et un à Bruxelles. De quoi défendre et promouvoir la riche gastronomie locale et de nombreuses productions artisanales.

Info : Bruxelles Champêtre, www.bruxelles-champetre.be.


France, pays de cocagne

Parmi les Sentinelles françaises on trouve ainsi le petit épeautre de Haute Provence, dont le soutien du mouvement, en 2005, a contribué à la création d’une IGP deux ans plus tard.

On trouve aussi le Rancio sec du Roussillon, un vin de fort degré dont les producteurs, réunis en association depuis 2004, sont soutenus par Slow Food pour obtenir une clarification réglementaire et sauver ainsi leur savoir-faire, la lentille blonde de Saint-Flour, recultivée grâce à quelques spécimens conservés par une famille.

On y trouve également le porc noir de Bigorre, la sentinelle la plus emblématique de l’action de Slow Food en France. Pour ce porc de type ibérique, qui serait le plus ancien connu dans notre pays, a été créé le Consortium du Noir de Bigorre, une association regroupant 55 éleveurs, trois salaisonniers, deux artisans charcutiers et deux conserveurs, engagés dans le respect d’un cahier des charges strict. En 2008, Slow Food France a créé quatre sentinelles : la poule gasconne, la brousse du Rove, un fromage de chèvre provençal dont l’aire de production s’étend aux Bouches du Rhône, au Sud du Vaucluse ainsi qu’à l’Ouest du Var, le bœuf nacré de Gascogne et les fromages d’estive des Pyrénées béarnaises.

Deux autres ont été consacrées en 2010, une année plus tournée vers l’Ouest : la vache bretonne pie noir et le chou de Lorient. L’année suivante, ce sont les huîtres bretonnes nées en mer (labellisées Ostréïculture durable et solidaire) et les fromages d’Auvergne au lait de race Salers qui sont devenus Sentinelles.

Le mouvement, très actif dans le Sud-Ouest, travaille actuellement à la relance d’autres produits parmi ceux catalogués dans l’Arche. Un panier précieux dans lequel on trouve encore la pêche Roussanne de Monein, les cerises d’Itxassou, les haricots de Soissons, un piment d’Espelette AOP bio, la poule de Barbézieux (décimée dans les années 60 par l’arrivée de l’aviculture intensive et sauvée dans les années 90) ou encore l’agneau de l’Estuaire de Gironde. Cet été, sur le chemin des sentinelles, que vos papilles soient vos meilleurs guides.  

Le Slow Food gagne du terrain

Liège

Le sirop artisanal et traditionnel de pomme et poire, premier produit belge à avoir rejoint la liste de l’Arche du goût. Le fromage de Herve au lait cru devrait lui aussi être reçu dans l’Arche des produits rares.

Bruxelles

À Bruxelles, Karikol a choisi de mettre plutôt l’accent sur la restauration, notamment à travers sa très visible opération Goûter Bruxelles.

Silly

La commune de Silly, a créé son convivium en 2005 (le plus ancien de Wallonie), en suivant l’exemple de sa commune jumelée, San Miniato en Toscane.

 

 

En savoir plus
www.karikol.be
www.slowfoodliege.be
www.slowfoodnamur.be
www.silly.be/slowfood
www.slowfoodvlaanderen.be
 

Isabelle Petiot

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