Flexitarien, le régime végétarien flexible
(Mise à jour : 29 mars 2016.)
« Alors, vous êtes végétarienne ? » « Non, je suis flexitarienne. » « Flexita…, quoi ? » Le mot, encore peu connu, surprend. Et pourtant, il décrit de plus en plus de consommateurs. Apparu à la fin des années 1990 aux États-Unis, il désigne ceux qui ont une alimentation surtout végétarienne, mais qui, occasionnellement, consomment un peu de viande et de poisson. Issu de la contraction de « flexible » et « végétarien », ce néologisme a même reçu en 2003 le titre du nouveau mot le plus utile de l’American Dialect Society, parce qu’il contribuait à changer les habitudes d’un nombre croissant de personnes.
Se permettre quelques écarts
Certaines personnes sont en fait déjà flexitariennes sans même sans rendre compte, le concept ayant servi à mettre un nom sur ce qui existait déjà. Il s'agit de personnes qui font simplement attention à ce qu’elles consomment et tentent de limiter leur consommation de viande et de poisson. Elles apprécient cependant également de pouvoir se permettre quelques écarts, que ce soit pour ne pas attirer l’attention lors de certaines occasions, ou juste par envie, par exemple en craquant pour un steak sans culpabiliser. En réalité, les flexitariens aiment avant tout la souplesse de ce choix alimentaire. Intéressées par la démarche des végétariens, ces personnes ne veulent cependant pas s’engager dans une pratique trop contraignante, ce qui irrite parfois les véritables végétariens. « Pour moi, la meilleure définition du flexitarien, c’est un végétarien à temps partiel qui sait se faire parfois plaisir avec de la viande, blanche de préférence, déclare Damien Galtier, diététicien nutritionniste et auteur d’un livre sur le sujet. Ce mode alimentaire est donc tout sauf une approche rigide. »
Un régime santé équilibré
Mais alors, concrètement, que mange un flexitarien ? « Dans ce type de régime, les végétaux occupent forcément une place de choix, au détriment des protéines animales et de la viande en particulier, poursuit Damien Galtier. Mais l’apport protéinique, indispensable au bon fonctionnement de l’organisme, reste équivalent. L’alimentation du flexitarien fait la part belle aux légumineuses (haricots secs, pois chiches, lentilles…) pour leur index glycémique intéressant, leur teneur en vitamines, magnésium et fibres. Ensuite, il choisit des céréales (riz, blé, avoine, millet, quinoa…) de préférence pas trop raffinées, plutôt semi-complètes ou complètes et cuites al dente, des fruits et légumes frais, si possible de saison et encore mieux de provenance locale, à l’huile d’olive et de colza, et du soja sous toutes ses formes (tofu, tofu soyeux ou tempeh). Il prévoit aussi un peu de laitage, des œufs, des poissons et des fromages. »
Le régime flexitarien est aussi un régime santé équilibré. Les familles d’aliments citées précédemment disposent de propriétés nutritionnelles idéales. « Ce régime procure un bien-être digestif dû à un apport plus grand de fibres qui règlent les problèmes de constipation, précise Damien Galtier. Moins de viande signifie également moins de toxines et moins de graisses saturées dont on connaît le rôle dans le développement des maladies cardiovasculaires et dans le vieillissement de nos cellules. Toutefois, la consommation ponctuelle de poisson ou de viande permet de réguler d’éventuelles carences en calcium, fer ou vitamine B12. Dernier point, une diète flexitarienne associée à une restriction calorique et une bonne activité physique permettent de perdre du poids. »
Une problématique écologique
Si la volonté de devenir flexitarien peut se justifier par le souci de manger sainement, d’autres raisons peuvent aussi pousser à faire ce choix. À commencer par la prise de conscience de l’aberration écologique que constitue l’alimentation carnée à laquelle notre société a donné beaucoup de place. Considérons déjà les conditions d’élevage à l’échelle industrielle, peu respectueuse des animaux. Moralement injustifiés, l’élevage et l’abattage des animaux constituent une triple négation : celle du respect du vivant, celle du respect de la planète et de ses ressources, et celle du principe de précaution en matière de santé publique. D’autant que les hectares alloués à l’élevage ne le sont pas à l’agriculture. La production de viande est cinquante fois plus consommatrice d’eau que la production de céréales. Un rapport de la FAO (Food and Agriculture Organization) d’octobre 2013 met aussi en avant le rôle important de l’élevage mondial dans le réchauffement climatique : il serait responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre. Il causerait également une forte dégradation des sols et polluerait l’eau par les rejets des animaux, les pesticides, les hormones et les engrais.
La motivation peut aussi venir du porte-monnaie. Le prix moyen d’achat de viande est de 10,58 € le kilo selon les enquêtes « Comportements et consommations alimentaires en France 2010 » du CREDOC. Le prix de la viande et du poisson ne cesse de grimper. En acheter régulièrement est devenu pour certains un privilège. Les études du CREDOC observent d’ailleurs une baisse de la consommation de viande des Français. La quantité est passée en moyenne de 65 g par jour à 55 g par jour entre 2003 et 2010. Passer au régime flexitarien, c’est donc se tourner vers des produits moins onéreux, tout en étant moins nocifs.
Raison et plaisir
Que cela soit par choix et véritable conviction ou par nécessité, le mouvement flexitarien prend de plus en plus d’importance dans le monde, au point de contribuer à la baisse de croissance du marché de la viande. Finalement, par son caractère conciliant et pratique, le flexitarisme semble être un bon compromis.
En savoir plus : « La méthode flexitarienne », de Damien Galtier, avec le Dr Franck Gigon, éd. First, janvier 2013 (142 pages, actuellement disponible seulement en version numérique).
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