Préparer sa terre
La tradition voulait qu’à l’automne, les jardiniers retournent complètement la terre de leurs massifs d’ornement et de leurs plates-bandes potagères, laissant le sol à vif tout l’hiver. À tort.
La structure de la terre reflète la manière dont ses éléments, en particulier l’argile et la matière organique, s’agglomèrent entre eux. En s’associant, ils forment des grumeaux, qui composent des mottes, entre lesquelles circulent l’air et l’eau. Les études d’agronomie récentes prouvent que si l’on retourne le sol, on le déstructure. Une bêche ne devrait servir qu’à creuser les trous de plantation. Mieux vaut se contenter d’utiliser une fourche ou une binette pour simplement soulever la terre, afin de l’aérer, d’enlever les herbes indésirables et de faire pénétrer les amendements, notamment le compost.
De plus, le sol ne doit jamais rester nu, sinon la pluie et le vent dispersent ses micro-éléments et il faudra à nouveau désherber au début du printemps. Deux solutions. Installer un paillis : un épais matelas fait de cartons ou, mieux, une couche d’une trentaine de centimètres d’épaisseur de broyat de végétaux qui va nourrir les micro-organismes et enrichir votre terre. Seconde option : semer des engrais verts.
Des fleurs « engrais »
On appelle ainsi des plantes qui servent à améliorer la nature du sol. En outre, elles poussent rapidement : leur couverture évite la dispersion des micro-éléments et l’installation de végétaux indésirables. Il en existe deux catégories. Celles qui cassent les mottes d’un sol lourd grâce à leur puissant chevelu racinaire ; et celles qui aspirent les minéraux du sol vers la surface, notamment l’azote.
On les sème à l’automne ; à la fin de l’hiver, on les arrache, on les broie puis les enfouit afin d’enrichir la surface des massifs. L’avoine, le seigle ou la jolie phacélie aux fleurs bleues qui attirent les pollinisateurs se sèment jusqu’en novembre pour alléger un sol collant. Un tapis de trèfle incarnat aux fleurs rouges offre une végétation dense qui libère l’azote.
La vesce, elle aussi, est une jolie fleur qui peut être associée aux autres engrais verts qui lui serviront de tuteur : sa végétation rapide et importante contribuera à étouffer les mauvaises herbes et à vous offrir tout l’hiver un joli parterre.
Adoptez une grelinette !
L’invention de monsieur Grelin, une fourche à bêcher, est aujourd’hui dans le domaine public. Ses deux manches bien écartés et la courbure de ses griffes assurent un puissant effet levier. Elle ameublit le sol sans le retourner et respecte la terre autant que votre dos. Trois, quatre ou cinq dents, vous choisirez le modèle en fonction de vos capacités et de la largeur de vos plates-bandes.
Les conseils d'un spécialiste Yves Gillen et Annick Bertrand ont choisi, il y a une trentaine d’années, de s’installer au cœur des marais de Brière, à Herbignac, non loin de Guérande (Loire-Atlantique), et d’y vivre en totale autonomie. Ils y ont construit pour trois fois rien leur habitat, doté de panneaux solaires et d’une éolienne d’appoint pour produire leur énergie, et se nourrissent naturellement des produits de leur joli potager. Alentours, ils ont aménagé un magnifique jardin d’agrément. Leur philosophie et leur site ont acquis une réputation européenne. Yves intervient régulièrement à l’École nationale supérieure du paysage de Versailles pour y aider les étudiants dans leurs travaux pratiques. « La couche de terre brunâtre utile aux plantes annuelles et vivaces a une profondeur d’une trentaine de centimètres. Certains micro-organismes y vivent en surface et ont besoin d’air, d’eau et de lumière pour œuvrer ; d’autres travaillent dans les profondeurs. Ces derniers, si l’on retourne complètement le milieu, se retrouvent à l’air et détruits. L’activité microbienne disparaît, le sol est fragilisé et attire les herbes indésirables et les prédateurs, telles les limaces. Inspirez-vous de la forêt : son sol fertile n’est jamais retourné et bénéficie d’un épais paillis. » |