Efficaces, concentrés, créatifs… mais sereins. Et si nous méditions au travail ?
Si je vous parle de méditation en entreprise, vous imaginez illico une équipe de cadres en costumes-chaussettes assis en lotus, en train de scander Aum dans les volutes d’encens ?… Eh bien, non, méditer au travail, ce n’est pas (nécessairement) ça ! Méditer, ce n’est pas arrêter de travailler, c’est cultiver toutes sortes d’attitudes nouvelles pour se concentrer, faire face aux tensions et se ressourcer intérieurement, précise le psychiatre Christophe André, à qui l’on doit la préface et le CD d’exercices d’un nouvel ouvrage qui caracole déjà en tête des ventes1. Ce livre clair et pratique, signé Michael Chaskalson – chercheur attaché à l’université de Bangor (Royaume-Uni), adepte depuis 35 ans de la méditation et instructeur en pleine conscience – propose une méthode simple, inspirée de la mindfulness (pleine conscience), pour méditer au travail, et ainsi réconcilier sérénité et efficacité. Cette méditation laïque, validée par les neurosciences et popularisée par Jon Kabat-Zinn, est une forme d’attention soutenue dans l’instant présent – à soi-même, aux autres et au monde qui nous entoure.
Du zapping stérile à la concentration féconde
Il faut bien avouer qu’à force de nous éparpiller, à la scène comme à la ville, de mails en réseaux sociaux, appels téléphoniques et autres SMS, nous avons de plus en plus de mal à nous concentrer et boucler ce que nous avons à faire… avec, à la clé, encore plus de stress !
Un cercle vicieux dont il devient difficile de s’extraire, tant les pressions se multiplient, entre obligation de performance et exigence d’instantanéité. Pourtant, face au trop-plein de tensions et de burn-out se dessine peu à peu une voie alternative qui cherche à remettre l’humain (et son harmonie) au centre de l’entreprise. L’idée n’est pas de planer au-dessus de la mêlée, mais bien d’allier, pour le meilleur, équilibre personnel et performance.
Dans son ouvrage1, Michael Chaskalson, qui assure des programmes de formation à la méditation auprès de nombreuses entreprises, montre ainsi, témoignages et exercices à l’appui, qu’il n’est pas utopique de réconcilier impératifs professionnels et bien-être, grâce à la méditation et aux pratiques de pleine conscience. Un bien-être qui rejaillit aussi sur la vie privée : Ça a changé ma vie. Pas seulement au bureau… Je crois que je suis aussi plus humain à la maison. Moins hargneux, plus disponible… J’ai le sentiment d’être plus vif, plus créatif et vraiment moins difficile à vivre, partage ainsi le conseiller juridique d’une entreprise de commerce en ligne, qui a goûté, dans le cadre de son travail, à un programme de pleine conscience de huit semaines. Les bienfaits de la méditation ne sont plus à démontrer : renforcement de l’immunité, meilleur sommeil, accroissement de la concentration, meilleure écoute des autres (plus d’empathie), davantage de créativité, d’émotions positives, etc.
Des bienfaits personnels qui sont aussi tout bénéfice pour l’entreprise : moins d’absentéisme et de conflits, plus d’implication, de productivité et d’innovation. Des séances de pleine conscience proposées aux employés de Transport for London, organisme chargé des transports en commun dans la capitale britannique, ont permis de modifier sensiblement l’absentéisme dû aux problèmes de santé. Les journées de travail perdues à cause du stress, de la dépression et de l’anxiété ont chuté de plus de 70 % dans les trois années suivantes, et l’ensemble des absences pour des raisons de santé a été divisé par deux, relève Michael Chaskalson1.
Ces petits riens qui changent tout
Une demi-heure de méditation est essentielle chaque jour, sauf quand on a une vie très occupée. Dans ce cas, une heure est nécessaire, proclamait déjà Saint François de Sales.
Que dirait-il à présent, vu nos emplois du temps déments ? ! S’il n’est pas toujours aisé de placer au quotidien une pratique formelle (méditation assise, yoga…) - bien que différentes études démontrent le lien entre le temps consacré à ces pratiques et l’amélioration du bien-être -, il est possible pour tout un chacun de semer, au fil des journées de travail, des exercices informels qui vont accroître, en toute simplicité, la présence au présent. Ces méditations sur l’instant, sortes de pauses de pleine conscience, offrent un recul salutaire dans la course contre la montre ambiante. Tels des sas de respiration permettant ensuite de repartir du bon pied dans nos activités, et d’offrir plus largement une meilleure qualité de vie. Rien de bien sorcier ! Ainsi, inspirée par cette approche, ai-je pris l’habitude, après chaque appel téléphonique, de prendre un instant pour me recentrer, redresser mon dos, sentir mes points d’appui sur la chaise de bureau… et respirer consciemment. Ça change déjà beaucoup de choses dans la texture des jours ! Variante : on peut aussi se servir de la sonnerie du téléphone comme autant d’appels à l’éveil. En profiter alors pour revenir à soi, en le laissant sonner quelques fois, le temps de retrouver son calme, avant de répondre. Dans Méditer au travail1, Michael Chaskalson et Christophe André proposent ainsi toute une série d’exercices du même acabit pour s’entraîner à la pleine conscience. Testez… et vous ne pourrez plus vous en passer !
Carnet pratique 1. À lire : Méditer au travail pour concilier sérénité et efficacité, Michael Chaskalson, Préface et CD audio d’exercices réalisés par Christophe André (Les Arènes, 2013). Pratiquer : Sur le site de l’Association pour le Développement de la Mindfulness (www.association-mindfulness.org), vous trouverez la liste des instructeurs MBSR/ Mindfulness-Based Stress Reduction ou Réduction du stress basée sur la pleine conscience (France, Belgique, Luxembourg, Suisse…), dont certains interviennent en entreprise. |